Les Muses Clio, Euterpe et Thalia par Eustache Le Sueur (1616-1655)
Ecouter sur DEEZER Composition : Eric Breton Interprétation : Odile Bruckert |
Victor Hugo - (1802-1885)
Chansons des rues et des bois
Dizain de femmes
Une de plus que les muses ;
Elles sont dix. On croirait,
Quand leurs jeunes voix confuses
Bruissent dans la forêt,
Entendre, sous les caresses
Des grands vieux chênes boudeurs,
Un brouhaha de déesses
Passant dans les profondeurs.
Elles sont dix châtelaines
De tout le pays voisin.
La ruche vers leurs haleines
Envoie en chantant l’essaim.
Elles sont dix belles folles,
Démons dont je suis cagot,
Obtenant des auréoles
Et méritant le fagot.
Que de cœurs cela dérobe,
Même à nous autres manants !
Chacune étale à sa robe
Quatre volants frissonnants.
Et court par les bois, sylphide
Toute parée, en dépit
De la griffe qui, perfide,
Dans les ronces se tapit.
...
Toutes les dix, sous les voûtes,
Des grands arbres, vont chantant ;
On est amoureux de toutes ;
On est farouche et content.
On les compare, on hésite
Entre ces robes qui font
La lueur d'une visite
Arrivant du ciel profond.
...
On sort du hallier champêtre,
La tête basse, à pas lents,
Le coeur pris, dans ce bois traître,
Par les quarante volants.