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Moustaki - Votre fille a vingt ans

         Georges Moustaki - Dessin de Gilles Poulou

Ecouter sur DEEZER
Interprétation de Serge Reggiani
Composition de Georges Moustaki
Ecouter la version chantée
Interprétation live : Georges Moustaki
Composition : Georges Moustaki
- Diffusé par DEEZER -



Georges Moustaki (1934-2013)


Votre fille a vingt ans

Votre fille a vingt ans, que le temps passe vite
Madame, hier encore elle était si petite
Et ses premiers tourments sont vos premières rides
Madame, et vos premiers soucis

Chacun de ses vingt ans pour vous a compté double
Vous connaissiez déjà tout ce qu'elle découvre
Vous avez oublié les choses qui la troublent
Madame, et vous troublaient aussi

On la trouvait jolie et voici qu'elle est belle
Pour un individu presque aussi jeune qu'elle
Un garçon qui ressemble à celui pour lequel
Madame, vous aviez embelli

Ils se font un jardin d'un coin de mauvaise herbe
Nouant la fleur de l'âge en un bouquet superbe
Il y a bien longtemps qu'on vous a mise en gerbes
Madame, le printemps vous oublie

Chaque nuit qui vous semble à chaque nuit semblable
Pendant que vous rêvez vos rêves raisonnables
De plaisir et d'amour ils se rendent coupables
Madame, au creux du même lit

Mais coupables jamais n'ont eu tant d'innocence
Aussi peu de regrets et tant d'insouciance
Qu'ils ne demandent même pas votre indulgence
Madame, pour leurs tendres délits

Jusqu'au jour où peut-être à la première larme
A la première peine d'amour et de femme
Il ne tiendra qu'à vous de sourire Madame
Madame, pour qu'elle vous sourie...



Du même auteur :
Il y avait jardin
Ma liberté
Votre fille a vingt ans

Barbara - Il pleut sur Nantes





Barbara - (1930-1997)


Il pleut sur Nantes

...
Un matin comme celui-là,
Il y a juste un an déjà,
La ville avait ce teint blafard,
Lorsque je sortis de la gare.
Nantes m'était alors inconnu,
Je n'y étais jamais venue.
Il avait fallu ce message
Pour que je fasse le voyage:
"Madame, soyez au rendez-vous,
25, rue de la Grange-aux-Loups.
Faites vite, il y a peu d'espoir;
Il a demandé à vous voir."
...


Cadou - Lettre à des amis perdus


Ecouter sur DEEZER
Composé et interprété
par Julos Beaucarne



René Guy Cadou (1920-1951)


Lettre à des amis perdus

Vous étiez là je vous tenais
Comme un miroir entre mes mains
La vague et le soleil de Juin
Ont englouti votre visage

Chaque jour je vous ai écrit
Je vous ai fait porter mes pages
Par des ramiers par des enfants
Mais aucun d'eux n'est revenu
Je continue à vous écrire

Tout le mois d'aout s'est bien passé
Malgré les obus et les roses
Et j'ai traduit diverses choses
En langue bleue que vous savez

Maintenant j'ai peur de l'automne
Et des soirées d'hiver sans vous
Viendrez-vous pas au rendez-vous
Que cet ami perdu vous donne
En son pays du temps des loups

Venez donc car je vous appelle
Avec tous les mots d'autrefois
Sous mon épaule il fait bien froid
Et j'ai des trous noirs dans les ailes



Du même auteur :
Anthologie
Automne
Chambre d'hiver
Etrange douceur
Hélène
Je t'attendais ainsi qu'on attend les navires
L'alphabet de la mort
L'aventure marine
La fleur rouge
Le temps des villas vides
Les chevaux de l'amour
Les femmes d'Ouessant
Les maisons du destin
Lettre à des amis perdus
Louisfert
Testament

Musset - Venise


        Interprété par Christopher Goldsack
        Sur une musique (et un texte adapté) de Charles Gounod


La version originale de Musset
Interprétée par Colombe Frézin
Composition : Hélène Triomphe
- Diffusé par DEEZER -




Alfred de Musset - (1810-1857)


Venise

Dans Venise la rouge,
Pas un bateau qui bouge,
Pas un pêcheur dans l'eau,
Pas un falot.

Seul, assis à la grève,
Le grand lion soulève,
Sur l'horizon serein,
Son pied d'airain.

Autour de lui, par groupes,
Navires et chaloupes,
Pareils à des hérons
Couchés en ronds,

Dorment sur l'eau qui fume,
Et croisent dans la brume,
En légers tourbillons,
Leurs pavillons.

La lune qui s'efface
Couvre son front qui passe
D'un nuage étoilé
Demi-voilé.

Ainsi, la dame abbesse
De Sainte-Croix rabaisse
Sa cape aux larges plis
Sur son surplis.

Et les palais antiques,
Et les graves portiques,
Et les blancs escaliers
Des chevaliers,

Et les ponts, et les rues,
Et les mornes statues,
Et le golfe mouvant
Qui tremble au vent,

Tout se tait, fors les gardes
Aux longues hallebardes,
Qui veillent aux créneaux
Des arsenaux.

Ah! maintenant plus d'une
Attend, au clair de lune,
Quelque jeune muguet,
L'oreille au guet.

Pour le bal qu'on prépare,
Plus d'une qui se pare,
Met devant son miroir
Le masque noir.

Sur sa couche embaumée,
La Vanina pâmée
Presse encor son amant,
En s'endormant ;

Et Narcissa, la folle,
Au fond de sa gondole,
S'oublie en un festin
Jusqu'au matin.

Et qui, dans l'Italie,
N'a son grain de folie ?
Qui ne garde aux amours
Ses plus beaux jours ?

Laissons la vieille horloge
Au palais du vieux doge
Lui compter de ses nuits
Les longs ennuis.

Comptons plutôt, ma belle,
Sur ta bouche rebelle
Tant de baisers donnés...
Ou pardonnés.

Comptons plutôt tes charmes,
Comptons les douces larmes,
Qu'à nos yeux a coûté
La volupté!


Lamartine - Le soir

Une version chantée
Compositeur : Charles Gounod
Interprète : Christopher Goldsack
- Diffusé par YOUTUBE -
Ecouter sur DEEZER
Compositeur : Charles Gounod
Interprète : Florence Tanzilli




Alphonse de Lamartine - (1790-1869)

Méditations poétiques


Le Soir

Le soir ramène le silence.
Assis sur ces rochers déserts,
Je suis dans le vague des airs
Le char de la nuit qui s'avance.

Vénus se lève à l'horizon ;
A mes pieds l'étoile amoureuse.
De sa lueur mystérieuse
Blanchit les tapis de gazon.

De ce hêtre au feuillage sombre
J'entends frissonner les rameaux :
On dirait autour des tombeaux
Qu'on entend voltiger une ombre.

Tout à coup détaché des cieux,
Un rayon de l'astre nocturne,
Glissant sur mon front taciturne,
Vient mollement toucher mes yeux.

Doux reflet d'un globe de flamme,
Charmant rayon, que me veux-tu ?
Viens-tu dans mon sein abattu
Porter la lumière à mon âme ?

Descends-tu pour me révéler
Des mondes le divin mystère?
Les secrets cachés dans la sphère
Où le jour va te rappeler?

Une secrète intelligence
T'adresse-t-elle aux malheureux ?
Viens-tu la nuit briller sur eux
Comme un rayon de l'espérance ?

Viens-tu dévoiler l'avenir
Au coeur fatigué qui t'implore ?
Rayon divin, es-tu l'aurore
Du jour qui ne doit pas finir ?

Mon coeur à ta clarté s'enflamme,
Je sens des transports inconnus,
Je songe à ceux qui ne sont plus
Douce lumière, es-tu leur âme ?

Peut-être ces mânes heureux
Glissent ainsi sur le bocage ?
Enveloppé de leur image,
Je crois me sentir plus près d'eux !

Ah ! si c'est vous, ombres chéries !
Loin de la foule et loin du bruit,
Revenez ainsi chaque nuit
Vous mêler à mes rêveries.

Ramenez la paix et l'amour
Au sein de mon âme épuisée,
Comme la nocturne rosée
Qui tombe après les feux du jour.

Venez !... mais des vapeurs funèbres
Montent des bords de l'horizon :
Elles voilent le doux rayon,
Et tout rentre dans les ténèbres.


Eluard - Bonne justice


Ecouter sur DEEZER
Composé et interprété
par Gerard Pitiot



Paul Eluard - (1895-1952)


Bonne justice

C'est la chaude loi des hommes
Du charbon ils font du feu
Du raisin ils font du vin
Des baisers ils font des hommes

C'est la dure loi des hommes
Se garder intact malgré
Les guerres et la misère
Malgré les dangers de mort

C'est la douce loi des hommes
De changer l'eau en lumière
Le rêve en réalité
Et les ennemis en frères

Une loi vieille et nouvelle
Qui va se perfectionnant
Du fond du coeur de l'enfant
Jusqu'à la raison suprême.


Rimbaud - Voyelles


Récité par Raphaël Didjaman
illustré de photos sur un fond constitué d'oeuvres de Pierre Soulages

Ecouter sur DEEZER
Composé et chanté
par Jean-Marc Versini



Arthur Rimbaud (1854-1891)


Voyelles

A noir, E blanc, I rouge, U vert, O bleu, voyelles,
Je dirai quelque jour vos naissances latentes.
A, noir corset velu des mouches éclatantes
Qui bombillent autour des puanteurs cruelles,

Golfe d’ombre ; E, candeur des vapeurs et des tentes,
Lance des glaciers fiers, rois blancs, frissons d’ombelles
I, pourpres, sang craché, rire des lèvres belles
Dans la colère ou les ivresses pénitentes ;

U, cycles, vibrements divins des mers virides,
Paix des pâtis semés d’animaux, paix des rides
Que l’alchimie imprime aux grands fronts studieux ;

O, suprême Clairon plein des strideurs étranges,
Silences traversés des Mondes et des Anges :
O l’Oméga, rayon violet de Ses Yeux !


Rousseau - Le devin du village


Ecouter sur DEEZER
Auteur : Jean-Jacques Rousseau
Compositeur : Jean-Jacques Rousseau
interprète : Nicolai Gedda



Jean-Jacques Rousseau - (Le devin du village - 1752)


Je vais revoir ma charmante maîtresse

Je vais revoir ma charmante maîtresse.
Adieu, châteaux, grandeurs, richesse,
Votre éclat ne me tente plus.
Si mes pleurs, mes soins assidus,
Peuvent toucher ce que j'adore,
Je vous verrai renaître encore,
Doux moments que j'ai perdus.

Quand on sait aimer et plaire,
A-t-on besoin d'autre bien?
Rends-moi ton coeur, ma bergère,
Colin t'a rendu le sien.
Mon chalumeau, ma houlette,
Soyez mes seules grandeurs;
Ma parure est ma Colette,
Mes trésors sont ses faveurs.

Que de seigneurs d'importance
Voudraient bien avoir sa foi!
Malgré toute leur puissance,
Ils sont moins heureux que moi.



Du même auteur :
Allons danser sous les ormeaux
Le devin du village
Que le temps me dure!

Aragon - Les oiseaux déguisés

                                                Louis Aragon

Ecouter sur DEEZER
Composé et interprété
par Jean Ferrat




Louis Aragon - (1897-1982)


Les oiseaux déguisés

Tous ceux qui parlent des merveilles
Leurs fables cachent des sanglots
Et les couleurs de leur oreille
Toujours à des plaintes pareilles
Donnent leurs larmes pour de l’eau

Le peintre assis devant sa toile
A-t-il jamais peint ce qu’il voit
Ce qu’il voit son histoire voile
Et ses ténèbres sont étoiles
Comme chanter change la voix

Ses secrets partout qu’il expose
Ce sont des oiseaux déguisés
Son regard embellit les choses
Et les gens prennent pour des roses
La douleur dont il est brisé

Ma vie au loin mon étrangère
Ce que je fus je l’ai quitté
Et les teintes d’aimer changèrent
Comme roussit dans les fougères
Le songe d’une nuit d’été

Automne automne long automne
Comme le cri du vitrier
De rue en rue et je chantonne
Un air dont lentement s’étonne
Celui qui ne sait plus prier


Aragon - Les Poètes

                                Antonio Machado

Ecouter sur DEEZER
Composé et interprété
par Jean Ferrat




Louis Aragon - (1897-1982)


Les Poètes

Je ne sais ce qui me possède
Et me pousse à dire à voix haute
Ni pour la pitié ni pour l'aide
Ni comme on avouerait ses fautes
Ce qui m'habite et qui m'obsède

Celui qui chante se torture
Quels cris en moi quel animal
Je tue ou quelle créature
Au nom du bien au nom du mal
Seuls le savent ceux qui se turent

Machado dort à Collioure
Trois pas suffirent hors d'Espagne
Que le ciel pour lui se fît lourd
Il s'assit dans cette campagne
Et ferma les yeux pour toujours

Au-dessus des eaux et des plaines
Au-dessus des toits des collines
Un plain-chant monte à gorge pleine
Est-ce vers l'étoile Hölderlin
Est-ce vers l'étoile Verlaine

Marlowe il te faut la taverne
Non pour Faust mais pour y mourir
Entre les tueurs qui te cernent
De leurs poignards et de leurs rires
A la lueur d'une lanterne

Étoiles poussières de flammes
En août qui tombez sur le sol
Tout le ciel cette nuit proclame
L'hécatombe des rossignols
Mais que sait l'univers du drame

La souffrance enfante les songes
Comme une ruche ses abeilles
L'homme crie où son fer le ronge
Et sa plaie engendre un soleil
Plus beau que les anciens mensonges


Hugo - Prière pour tous

        Serge Kerval Chante Victor Hugo - CD Réf: ARN 64581

Ecouter sur DEEZER
Composé et interprété
par Serge Kerval




Victor Hugo - (1802-1885)

Les feuilles d'automne


La prière pour tous - VII

Ô myrrhe ! ô cinname !
Nard cher aux époux !
Baume ! éther ! dictame !
De l’eau, de la flamme,
Parfums les plus doux !

Prés que l’onde arrose !
Vapeurs de l’autel !
Lèvres de la rose
Où l’abeille pose
Sa bouche de miel !

Jasmin ! asphodèle !
Encensoirs flottants !
Branche verte et frêle
Où fait l’hirondelle
Son nid au printemps !

Lis que fait éclore
Le frais arrosoir !
Ambre que Dieu dore !
Souffle de l’aurore,
Haleine du soir !

Parfum de la sève
Dans les bois mouvants !
Odeur de la grève
Qui la nuit s’élève
Sur l’aile des vents !

Fleurs dont la chapelle
Se fait un trésor !
Flamme solennelle,
Fumée éternelle
Des sept lampes d’or !

Tiges qu’a brisées
Le tranchant du fer !
Urnes embrasées !
Esprits des rosées
Qui flottez dans l’air !

Fêtes réjouies
D’encens et de bruits !
Senteurs inouïes !
Fleurs épanouies
Au souffle des nuits !

Odeurs immortelles
Que les Ariel,
Archanges fidèles,
Prennent sur leurs ailes
En venant du ciel !

Ô couche première
Du premier époux !
De la terre entière,
Des champs de lumière
Parfums les plus doux !

Dans l’auguste sphère,
Parfums, qu’êtes-vous,
Près de la prière
Qui dans la poussière
S’épanche à genoux !

Près du cri d’une âme
Qui fond en sanglots,
Implore et réclame,
Et s’exhale en flamme,
Et se verse à flots !

Près de l’humble offrande
D’un enfant de lin
Dont l’extase est grande
Et qui recommande son père orphelin !

Bouche qui soupire,
Mais sans murmurer !
Ineffable lyre !
Voix qui fait sourire et qui fait pleurer !


Marot - Le dizain de neige



Ecouter la version chantée
Interprétation : Gerard Souzay
Composition : Maurice Ravel
- Diffusé par DEEZER -




Clément Marot (1496-1544)


Le dizain de neige

Anne, par jeu, me jeta de la neige,
Que je cuidais froide certainement;
Mais c'était feu; l'expérience en ai-je,
Car embrasé je fus soudainement.
Puisque le feu loge secrètement
Dedans la neige, où trouverai-je place
Pour n'ardre point? Anne, ta seule grâce
Éteindre peut le feu que je sens bien,
Non point par eau, par neige, ni par glace,
Mais par sentir un feu pareil au mien.


Ecouter sur YOUTUBE
l'interprétation d'Elly Ameling
sur une musique de Maurice Ravel

Prévert - Chanson des escargots

                Cora Vaucaire en 1966 - Photo © Gérald Bloncourt

Ecouter sur DEEZER
Interprété par Cora Vaucaire
sur une musique de Joseph Kosma




Jacques Prévert - (1900-1977)


La Chanson des Escargots

A l’enterrement d’une feuille morte
Deux escargots s’en vont
Ils ont la coquille noire
Du crêpe autour des cornes
Ils s’en vont dans le soir
Un très beau soir d’automne
Hélas quand ils arrivent
C’est déjà le printemps
Les feuilles qui étaient mortes
Sont toutes ressuscitées
Et les deux escargots
Sont très désappointés
Mais voila le soleil
Le soleil qui leur dit
Prenez prenez la peine
La peine de vous asseoir
Prenez un verre de bière
Si le coeur vous en dit
Prenez si ça vous plaît
L’autocar pour Paris
Il partira ce soir
Vous verrez du pays
Mais ne prenez pas le deuil
C’est moi qui vous le dit
Ça noircit le blanc de l’oeil
Et puis ça enlaidit
Les histoires de cercueils
C’est triste et pas joli
Reprenez vous couleurs
Les couleurs de la vie
Alors toutes les bêtes
Les arbres et les plantes
Se mettent à chanter
A chanter à tue-tête
La vrai chanson vivante
La chanson de l’été
Et tout le monde de boire
Tout le monde de trinquer
C’est un très joli soir
Un joli soir d’été
Et les deux escargots
S’en retournent chez eux
Ils s’en vont très émus
Ils s’en vont très heureux
Comme ils ont beaucoup bu
Ils titubent un petit peu
Mais la haut dans le ciel
La lune veille sur eux.


Sully Prudhomme - Le long du quai


Une composition de Gabriel Fauré
Interprétation : Ninon Vallin (1932)
Piano : Marguerite Long.





René-François Sully Prudhomme - (1839-1907)


Les Berceaux

Le long du quai les grands vaisseaux,
Que la houle incline en silence,
Ne prennent pas garde aux berceaux
Que la main des femmes balance.

Mais viendra le jour des adieux;
Car il faut que les femmes pleurent
Et que les hommes curieux
Tentent les horizons qui leurrent.

Et ce jour-là les grands vaisseaux,
Fuyant le port qui diminue,
Sentent leur masse retenue
Par l'âme des lointains berceaux.


Baudelaire - L'homme et la mer

Photo (c) Fred Guillot

Ecouter sur DEEZER
Composé et interprété
par Georges Chelon



Charles Baudelaire (1821-1867)


L'homme et la mer

Homme libre, toujours tu chériras la mer !
La mer est ton miroir ; tu contemples ton âme
Dans le déroulement infini de sa lame,
Et ton esprit n’est pas un gouffre moins amer.

Tu te plais à plonger au sein de ton image ;
Tu l’embrasses des yeux et des bras, et ton cœur
Se distrait quelquefois de sa propre rumeur
Au bruit de cette plainte indomptable et sauvage.

Vous êtes tous les deux ténébreux et discrets :
Homme, nul n’a sondé le fond de tes abîmes ;
Ô mer, nul ne connaît tes richesses intimes,
Tant vous êtes jaloux de garder vos secrets !

Et cependant voilà des siècles innombrables
Que vous vous combattez sans pitié ni remord,
Tellement vous aimez le carnage et la mort,
Ô lutteurs éternels, ô frères implacables !


Eluard chanté par Barbara - Printemps


Ecouter sur DEEZER
Composé et interprété
par Barbara



Paul Eluard - (1895-1952)


Printemps

Il y a sur la plage quelques flaques d’eau
Il y a dans les bois des arbres fous d’oiseaux
La neige fond dans la montagne
Les branches des pommiers brillent de tant de fleurs
Que le pâle soleil recule

C’est par un soir d’hiver dans un monde très dur
Que je vis ce printemps près de toi l’innocente
Il n’y a pas de nuit pour nous
Rien de ce qui périt n’a de prise sur toi
Et tu ne veux pas avoir froid

Notre printemps est un printemps qui a raison


Brassens - Chanson pour l'Auvergnat


Ecouter sur DEEZER
Composé et interprété
par Georges Brassens





Georges Brassens - (1921-1981)


Chanson pour l'Auvergnat

Elle est à toi, cette chanson,
Toi, l'Auvergnat qui, sans façon,
M'as donné quatre bouts de bois
Quand, dans ma vie, il faisait froid,
Toi qui m'as donné du feu quand
Les croquantes et les croquants,
Tous les gens bien intentionnés,
M'avaient fermé la porte au nez...
Ce n'était rien qu'un feu de bois,
Mais il m'avait chauffé le corps,
Et dans mon âme il brûle encore
A la manière d'un feu de joie.

Toi, l'Auvergnat, quand tu mourras,
Quand le croque-mort t'emportera,
Qu'il te conduise, à travers ciel,
Au Père éternel.

Elle est à toi, cette chanson,
Toi, l'Hôtesse qui, sans façon,
M'as donné quatre bouts de pain
Quand, dans ma vie, il faisait faim,
Toi qui m'ouvris ta huche quand
Les croquantes et les croquants,
Tous les gens bien intentionnés,
S'amusaient à me voir jeûner...
Ce n'était rien qu'un peu de pain,
Mais il m'avait chauffé le corps,
Et dans mon âme il brûle encore
A la manière d'un grand festin.

Toi, l'Hôtesse quand tu mourras,
Quand le croque-mort t'emportera,
Qu'il te conduise, à travers ciel,
Au Père éternel.

Elle est à toi, cette chanson,
Toi, l’étranger qui sans façon,
D'un air malheureux m'as souri
Lorsque les gendarmes m'ont pris,
Toi qui n'as pas applaudi quand
Les croquantes et les croquants,
Tous les gens bien intentionnés,
Riaient de me voir amené...
Ce n'était rien qu'un peu de miel,
Mais il m'avait chauffé le corps,
Et dans mon âme il brûle encore
A la manière d'un grand soleil.

Toi, l’étranger, quand tu mourras,
Quand le croque-mort t'emportera,
Qu'il te conduise, à travers ciel,
Au Père éternel.


Ronsard - Vous triomphez de moi


Ecouter sur DEEZER
Compositeur : Serge Renard
Interprète : Serge Bouzouki




Pierre de Ronsard 1524 - 1585


Vous triomphez de moi

Vous triomphez de moy, et pource je vous donne
Ce lhierre, qui coule et se glisse à l'entour
Des arbres et des murs, lesquels tour dessus tour,
Plis dessus plis il serre, embrasse et environne.

A vous de ce lhierre appartient la Couronne.
Je voudrois, comme il fait, et de nuict et de jour
Me plier contre vous, et languissant d'amour,
D'un nœud ferme enlasser vostre belle colonne.

Ne viendra point le temps, que dessous les rameaux,
Au matin où l'Aurore esveille toutes choses,
En un ciel bien tranquille, au caquet des oiseaux

Je vous puisse baiser à lévres demy-closes,
Et vous conter mon mal, et de mes bras jumeaux
Embrasser à souhait vostre yvoire et vos roses?


Baudelaire - Le vampire


        Vampire Girl par Victoria Francés

Ecouter sur DEEZER
Interprété par Ken Meyers
sur une musique de Régis Flécheau
Ecouter sur DEEZER
La version du groupe
Jeune Goinfre



Charles Baudelaire - 1868


Le vampire

Toi qui, comme un coup de couteau,
Dans mon coeur plaintif es entrée ;
Toi qui, forte comme un troupeau
De démons, vins, folle et parée,

De mon esprit humilié
Faire ton lit et ton domaine ;
- Infâme à qui je suis lié
Comme le forçat à la chaîne,

Comme au jeu le joueur têtu,
Comme à la bouteille l’ivrogne,
Comme aux vermines la charogne,
- Maudite, maudite sois-tu !

J’ai prié le glaive rapide
De conquérir ma liberté,
Et j’ai dit au poison perfide
De secourir ma lâcheté.

Hélas ! le poison et le glaive
M’ont pris en dédain et m’ont dit :
"Tu n’es pas digne qu’on t’enlève
A ton esclavage maudit,

Imbécile ! - de son empire
Si nos efforts te délivraient,
Tes baisers ressusciteraient
Le cadavre de ton vampire !"


Aragon - C

        Un pont de la ville nommée "Les Ponts de Cé" - Photo (c) Laurent Boucher

Ecouter sur DEEZER
Interprétation de Pierre Bernac
Composition de Francis Poulenc
Ecouter sur DEEZER
Composé et interprété
par Jacques Bertin



Louis Aragon - (1897-1982)

Les yeux d'Elsa


C

J’ai traversé Les-Ponts-de-Cé
C’est là que tout a commencé

Une chanson des temps passés
Parle d’un chevalier blessé

D’une rose sur la chaussée
Et d’un corsage délacé

Du château d’un duc insensé
Et des cygnes dans les fossés

De la prairie où vient danser
Une éternelle fiancée

Et j’ai bu comme un lait glacé
Le long lai des gloires faussées

La Loire emporte mes pensées
Avec les voitures versées

Et les armes désamorcées
Et les larmes mal effacées

O ma France ô ma délaissée
J’ai traversé Les-Ponts-de-Cé


Verlaine - Spleen

                Paul Verlaine - Dessin de Roger-Viollet (1890)

Ecouter sur DEEZER
Chanté par Marc Robine
Musique d'Helène Triomphe


Paul Verlaine - (1844-1896)

Romances sans paroles


Il pleure dans mon coeur

Il pleure dans mon coeur
Comme il pleut sur la ville ;
Quelle est cette langueur
Qui pénètre mon coeur ?

Ô bruit doux de la pluie
Par terre et sur les toits !
Pour un coeur qui s’ennuie,
Ô le chant de la pluie !

Il pleure sans raison
Dans ce coeur qui s’écoeure.
Quoi ! nulle trahison ?…
Ce deuil est sans raison.

C’est bien la pire peine
De ne savoir pourquoi
Sans amour et sans haine
Mon coeur a tant de peine !



Vigneault - Mon Pays


Ecouter sur DEEZER
Interprétation : Catherine Sauvage
Composition : Gilles Vigneault




Gilles Vigneault - (1928-)


Mon Pays

Mon pays ce n'est pas un pays c'est l'hiver
Mon jardin ce n'est pas un jardin c'est la plaine
Mon chemin ce n'est pas un chemin c'est la neige
Mon pays ce n'est pas un pays c'est l'hiver

Dans la blanche cérémonie
Où la neige au vent se marie
Dans ce pays de poudrerie
Mon père a fait bâtir maison
Et je m'en vais être fidèle
À sa manière à son modèle
La chambre d'amis sera telle
Qu'on viendra des autres saisons
Pour se bâtir à côté d'elle

Mon pays ce n'est pas un pays c'est l'hiver
Mon refrain, ce n'est pas un refrain, c'est rafale
Ma maison, ce n'est pas ma maison, c'est froidure
Mon pays ce n'est pas un pays c'est l'hiver

De mon grand pays solitaire
Je crie avant que de me taire
À tous les hommes de la terre
Ma maison c'est votre maison
Entre mes quatre murs de glace
Je mets mon temps et mon espace
À préparer le feu la place
Pour les humains de l'horizon
Et les humains sont de ma race

Mon pays ce n'est pas un pays c'est l'envers
D'un pays qui n'était ni pays ni patrie
Ma chanson ce n'est pas ma chanson c'est ma vie
C'est pour toi que je veux posséder mes hivers...





        Ecrit, composé et interprété par Gilles Vigneault

Du même auteur :
Berceuse du temps de la colonie
La complainte
Les corbeaux
Mon Pays
Quand vous mourrez de nos amours

Desnos - O Jeunesse

Robert Desnos à Theresienstadt en 1945

Ecouter sur DEEZER
Interprété par Marc Robine
sur une musique d'Hélène Triomphe



Robert Desnos - (1900-1945) - Destinée arbitraire


Ô Jeunesse

Ô jeunesse voici que les noces s’achèvent
Les convives s’en vont des tables du banquet
Les nappes sont tachées de vin et le parquet
Est blanchi par les pas des danseurs et des rêves

Une vague a roulé des roses sur la grève
Quelque amant malheureux jeta du haut du quai
Dans la mer en pleurant reliques et bouquets
Et les rois ont mangé la galette et la fève

Midi flambant fait pressentir le crépuscule
Le cimetière est plein d’amis qui se bousculent
Que leur sommeil soit calme et leur mort sans rigueur

Mais tant qu’il restera du vin dans les bouteilles
Qu’on emplisse mon verre et bouchant mes oreilles
J’écouterai monter l’océan dans mon coeur.


Desnos - La fourmi


        Interprétation : Chorale parents-enfants de Marc Delattre (compositeur)

Ecouter sur DEEZER
Interprété par Juliette Greco
sur une musique de Joseph Kosma



Robert Desnos - (1900-1945) - Chantefables


La fourmi

Une fourmi de dix-huit mètres
Avec un chapeau sur la tête,
Ça n’existe pas, ça n’existe pas.
Une fourmi traînant un char
Plein de pingouins et de canards,
Ça n’existe pas, ça n’existe pas.
Une fourmi parlant français,
Parlant latin et javanais,
Ça n’existe pas, ça n’existe pas.
Eh ! Pourquoi pas ?




Eluard - Liberté

        La Liberté guidant le Peuple par Eugène Delacroix

Ecouter sur DEEZER
Composé et interprété
par Jairo



Paul Eluard - (1895-1952)


Liberté

Sur mes cahiers d'écolier
Sur mon pupitre et les arbres
Sur le sable sur la neige
J'écris ton nom

Sur toutes les pages lues
Sur toutes les pages blanches
Pierre sang papier ou cendre
J'écris ton nom

Sur les images dorées
Sur les armes des guerriers
Sur la couronne des rois
J'écris ton nom

Sur la jungle et le désert
Sur les nids sur les genêts
Sur l'écho de mon enfance
J'écris ton nom

Sur les merveilles des nuits
Sur le pain blanc des journées
Sur les saisons fiancées
J'écris ton nom

Sur tous mes chiffons d'azur
Sur l'étang soleil moisi
Sur le lac lune vivante
J'écris ton nom

Sur les champs sur l'horizon
Sur les ailes des oiseaux
Et sur le moulin des ombres
J'écris ton nom

Sur chaque bouffée d'aurore
Sur la mer sur les bateaux
Sur la montagne démente
J'écris ton nom

Sur la mousse des nuages
Sur les sueurs de l'orage
Sur la pluie épaisse et fade
J'écris ton nom

Sur les formes scintillantes
Sur les cloches des couleurs
Sur la vérité physique
J'écris ton nom

Sur les sentiers éveillés
Sur les routes déployées
Sur les places qui débordent
J'écris ton nom

Sur la lampe qui s'allume
Sur la lampe qui s'éteint
Sur mes raisons réunies
J'écris ton nom

Sur le fruit coupé en deux
Du miroir et de ma chambre
Sur mon lit coquille vide
J'écris ton nom

Sur mon chien gourmand et tendre
Sur ses oreilles dressées
Sur sa patte maladroite
J'écris ton nom

Sur le tremplin de ma porte
Sur les objets familiers
Sur le flot du feu béni
J'écris ton nom

Sur toute chair accordée
Sur le front de mes amis
Sur chaque main qui se tend
J'écris ton nom

Sur la vitre des surprises
Sur les lèvres attentives
Bien au-dessus du silence
J'écris ton nom

Sur mes refuges détruits
Sur mes phares écroulés
Sur les murs de mon ennui
J'écris ton nom

Sur l'absence sans désir
Sur la solitude nue
Sur les marches de la mort
J'écris ton nom

Sur la santé revenue
Sur le risque disparu
Sur l'espoir sans souvenir
J'écris ton nom

Et par le pouvoir d'un mot
Je recommence ma vie
Je suis né pour te connaître
Pour te nommer

Liberté





        Compositeur : Julien Joubert - Interprète : Victor Jacob